Comment un silence peut faire perdre une bonne idée
24 novembre 2025Gestion d'équipe, Intelligence émotionnelle
Le problème
Il m’est arrivé à plusieurs reprises, lors d’ateliers ou de séances de coordination, d’assister à une scène parfaitement révélatrice. Une personne junior, ou récemment arrivée dans l’équipe, propose une idée originale, un peu décalée mais vraiment pertinente. Et pourtant, sans une intervention extérieure, l’équipe l’aurait laissée passer, comme cela arrive souvent dans des environnements où la hiérarchie prend trop de place et l’intelligence émotionnelle trop peu.
La personne la plus expérimentée du groupe écoute, sans réagir. Pas un signe d’approbation, pas de désaccord non plus. Juste un silence.
Rien de dramatique. Et pourtant, la dynamique change immédiatement. Le reste de l’équipe réoriente la discussion, comme si l’idée n’avait jamais existé.
Ce genre de situation est courant. Les idées ne s’effacent pas parce qu’elles manquent de qualité, mais souvent parce qu’elles ne sont pas réellement entendues par le groupe.
Ce que l’on oublie souvent
Quand quelqu’un ose proposer quelque chose de nouveau, surtout s’il se trouve en position moins affirmée, il s’expose.
Il y a toujours un instant de vulnérabilité : la crainte du jugement, la peur d’être à côté du sujet, l’impression de parler trop tôt ou de ne pas être légitime.
Dans les scènes que j’ai observées, ce n’est pas un refus explicite qui a fait reculer l’idée, mais une simple absence de réaction. Le silence de la personne reconnue, combiné au silence du reste du groupe, aurait suffit à faire disparaître la proposition.
On dit souvent que l’innovation dépend de la créativité ou des méthodes. En réalité, elle dépend d’abord de la manière dont les émotions circulent, surtout lorsque les rôles et les statuts entrent en jeu.
Ce qui aide dans ces moments-là
Voici trois pratiques qui peuvent faire la différence .
- Clarifier l’intention du silence . Le silence n’est pas toujours un désaccord. Parfois, c’est de l’attention. Parfois, c’est de la prudence. Dire quelque chose d’aussi simple que « laisse-moi réfléchir un instant » évite au groupe d’interpréter.
- S’assurer que chacun peut contribuer sans lire entre les lignes. Dans la scène vécue, il a suffi d’un signe, positif ou neutre, pour tout rééquilibrer. Accueillir une idée par un « explique-nous ce que tu as en tête » crée un espace où chacun se sent légitime, quel que soit son statut.
- Donner sa chance à l’idée avant de la juger. Lui laisser un court moment pour exister et l’explorer collectivement, même de manière simple et rapide, permet souvent d’en révéler le potentiel. Ce temps d’attention donne à l’idée une vraie chance de se développer au lieu de disparaître sans avoir été comprise.
Comment l’appliquer au quotidien
Observer attentivement les moments où une idée émerge, relever les silences qui s’installent et les signes d’hésitation dans le groupe. Prendre un court instant pour revenir sur la proposition, demander à la personne de préciser ce qu’elle a en tête et permettre au groupe d’explorer l’idée sans l’évaluer trop vite. Créer volontairement ces petits espaces d’attention évite de laisser disparaître des pistes prometteuses et aide les idées fragiles à trouver leur place.